Héroïsme

Les Panthères du Gabon : des valeurs en miroir d’une défaite héroïque

Les Panthères du Gabon : des valeurs en miroir d’une défaite héroïque
Les Panthères du Gabon : des valeurs en miroir d’une défaite héroïque © 2022 D.R./Info241

L’élimination douloureuse du Gabon en 8e de finale de la 33e Coupe d’Afrique des nations de football fait toujours couler beaucoup d’encre et de salive. C’est fois, le tour revient à l’universitaire et essayiste Marc Mvé Bekale de livrer pour les lecteurs d’Info241, son analyse de la prestation des Panthères du Gabon. Pour l’auteur face au Burkina Faso, « la chance n’a pas souri aux plus vaillants ». Non sans mettre en miroir cette « leçon d’héroïsme » donnée par la sélection nationale de football avec la situation politique du Gabon.

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Le Gabon vient d’être éliminé de la CAN 2022. L’équipe des Panthères n’a pas dépassé la huitième de finale. Réduites à dix à la 67ème minute, on croyait les Panthères crucifiées. Mais elles ont résisté, réagi, puis rugi de la plus belle manière par leur capitaine Bruno Ecuélé Manga. Pendant plus d’une cinquantaine de minutes, amputées d’un membre, elles ont combattu jusqu’à ce que, au final, la providence tranche. Reconnaissons-le : la chance n’a pas souri aux plus vaillants ; le courage et la détermination n’ont pas payé.

Une leçon d’héroïsme

Nous restons néanmoins marqués par une performance qui apparaît comme une leçon d’héroïsme. Sans occulter le travail collectif, deux joueurs se sont particulièrement illustrés contre le Burkina Faso. L’un, le gardien Jean-Noël Amonome, découvrait, à 24 ans, les émotions vertigineuses du football de haut niveau ; l’autre, défenseur central aguerri, habitué des compétitions rudes, jouait, en véritable maestro, la meilleure partition de son art : Bruno Ecuélé Manga. Certes ces deux joueurs ont proposé une performance fort remarquée, c’est bien sûr l’ensemble de l’équipe qui a la reconnaissance de tout un peuple.

Des joueurs engagés

L’élimination des Panthères laisse incontestablement un goût amer, leur prestation a cependant mis au jour un état mental qui ne manquera pas d’inspirer les plus jeunes. Elle aura sans doute une puissante résonance dans le psychisme national de par sa symbolique et les valeurs qui s’en dégagent. C’est que, au-delà du football, elle va nourrir le rêve politique d’un pays habité par les valeurs éthiques dont ont fait preuve les Panthères tout au long de ce tournoi.

Un renouveau

Bruno Ecuélé a porté son équipe par l’exemplarité. Sa présence faisait office d’adjuvant moral. Cela se voyait au cours des matchs par le soutien psychologique qu’il apportait à ses jeunes co-équipiers vivant leur baptême de feu. Il devint cette figure mobilisatrice dont le pays a si grand besoin pour avancer.

De même, l’aventure de Jean-Noël Amonome, peut se lire comme un conte moral. Au départ, l’homme n’inspirait aucune confiance. Quand les caméras de télévision scrutaient son regard, on y lisait davantage le doute, l’anxiété, l’appréhension que l’assurance. Nous étions inquiets pour la sentinelle de la tanière des Panthères dont beaucoup bradaient déjà la peau sur les réseaux sociaux.

Puis vint le match de la révélation, où l’on vit, à notre plus grande satisfaction, un Amonome complètement métamorphosé. Plus de quatre sauvetages d’occasions nettes de buts. Arrêt d’un pénalty. Un grand gardien naissait au stade de la ville de Limbé ce lundi 23 janvier. Sans doute les chasseurs de têtes de riches clubs européens l’ont-ils repéré et le sortiront de son refuge d’AmaZulu où, semble-t-il, il n’occupe même pas la place de titulaire.

L’extrapolation

La transfiguration d’Amonome se prête quelque peu à un jeu d’extrapolation. Elle invite à dépasser la sphère du football pour l’apprécier à l’aune de la vie politique du Gabon, dominée par une génération d’hommes et de femmes usée, rouillée, archaïque, qui s’accroche à ses privilèges, refuse de faire place ou de laisser éclore de nouveaux talents. Tout corps, quelle que soit sa nature, a besoin de régénération au risque de stagner avant de dépérir.

C’est ce que l’on voit au Gabon. La paralysie de ce pays semble liée au refus de paramétrage de son logiciel politique par l’intégration de nouvelles composantes (le goût de l’effort, le sens de l’abnégation, la détermination) que nous avons vues en miroir dans le jeu des Panthères.

Marc Mvé Bekale, Universitaire & essayiste

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