Portrait

Jean-Stanislas Migolet, de policier à sénateur français puis ministre d’Omar Bongo

Jean-Stanislas Migolet, de policier à sénateur français puis ministre d’Omar Bongo
Jean-Stanislas Migolet, de policier à sénateur français puis ministre d’Omar Bongo © 2021 D.R./Info241

Avec l’implantation de l’administration coloniale française en Afrique équatoriale et en Afrique de l’ouest, les colons dû restructurer l’éducation des populations indigènes pour que celles-ci s’arriment au mode de vie professionnelle occidental. Il a alors fallu former en masse des travailleurs locaux issus des villages et des bribes de villes pour que ces derniers puissent venir grossir les rangs des sociétés et autres organisations. En ces temps, il fallait augmenter significativement la main-d’œuvre indigène et la développer.

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L’administration coloniale engagea alors plusieurs hommes instruits dans le but de travailler à son bon fonctionnement car plusieurs colons ne daignaient se rendre en Afrique et en particulier en Afrique équatoriale en raison du climat difficile et des conditions de vie éprouvante. Au fil des ans, une multitude de lettrés locaux devinrent de plus en plus important dans le paysage administratif colonial jusqu’à occuper des postes de hautes responsabilités au sein des représentations territoriales.

Avec l’accession à la souveraineté internationale de leurs pays, ils furent alors des gestionnaires étatiques mais d’autres se distinguèrent par leurs sagesses et leurs professionnalismes. Nous retraçons aujourd’hui l’histoire de Jean-Stanislas Migolet (1920-), un de ses commis d’état gabonais à l’instruction et à la rigueur remarquables mais qui fut, comme beaucoup des instruits de l’époque, assujetti aux régimes qui les gouvernaient.

 Présentation générale

Jean-Stanislas Migolet est né le 1er août 1920 en Afrique équatoriale française (AEF) dans la circonscription territoriale de Koulamoutou au moment où le Gabon était encore une colonie de l’empire français. Il est issu de l’union de feu Boubanga Joseph et de feue Gwayédi Julienne. Cadet d’une famille de huit enfants, il fut lui-même le père d’une nombreuse progéniture.

Il convola en justes noces avec Mouyéghé Marie-Louise devenue Migolet Marie-Louise le 19 mars 1958 à Libreville. Mais bien avant son union avec cette dernière, il épousa en premières noces le 17 mai 1944 à Port-Gentil, une dame du nom de Mbapa. Jean-Stanislas Migolet eut au total quatre femmes qu’il épousa au régime polygamique.

 Formation

C’est à Mbigou qui était alors une circonscription territoriale de l’actuel province de la Ngounié que le jeune Migolet reçut son instruction coloniale. Il lui fut enseigné la lecture et l’écriture afin d’établir dans esprit, des bases scolaires fortes. Il suivit ensuite des cours élaborées pour parfaire son enseignement. A la fin des années 1930, Jean-Stanislas Migolet alors proche de la vingtaine d’années souhaite rejoindre les forces de sécurité et de défense de l’AEF. Il prendra alors des cours par correspondance pour être titularisé agent de police.

 Carrière professionnelle

A l’âge de 15 ans, Jean-Stanislas Migolet alors adolescent souhaite rentrer dans la vie active. Ayant reçu une instruction de qualité pour les indigènes de l’époque sans avoir fréquenté le collège et encore moins le lycée, Jean-Stanislas Migolet décide d’atterrir à Port-Gentil. Il trouve du boulot au sein d’une scierie de la place. Mais il a l’intention de rejoindre l’administration coloniale et se voit bien agent de police.

Il suit alors des cours par correspondance et devient en 1941 agent de police stagiaire. Il est alors envoyé en service à Port-Gentil. Deux ans plus tard, Jean-Stanislas Migolet devient alors agent de police titulaire de 4ème classe du cadre subalterne indigène de la police de l’administration générale de l’AEF. Il y gravit les échelons et finit par devenir administrateur civil en chef.

 Carrière politique d’avant l’indépendance

A la suite de la Seconde Guerre Mondiale, un référendum constitutionnel est convoqué en France en 1946 et une nouvelle constitution donnant lieu à « L’Union française » est adoptée. Celle-ci permet d’intégrer les colonies françaises d’Afrique dans l’Union française et ainsi de leur donner plus d’autonomie dans leurs organisations politiques et d’abolir certaines pratiques malsaines ; ces réformes avaient déjà été émises par le général De Gaulle lors de la conférence de Brazzaville de 1944.

En Afrique occidentale française (AOF) par exemple, le travail forcé est aboli. En AEF, on assiste à la naissance de partis politiques notamment au Gabon avec notamment l’Union démocratique et sociale gabonais (USDG) du député gabonais à l’Assemblée nationale française, Jean-Hilaire Aubame. Par ailleurs en octobre 1946, des représentations nationales sont alors instaurées et le Gabon comme d’autres anciennes colonies françaises d’Afrique devenues territoires français d’Outre-mer se dote d’une assemblée représentative d’abord appelée « Conseil représentatif ».

Jean-Stanislas Migolet se présente au cours de l’élection législative de décembre 1946 pour le compte de la province de la Ngounié et devient le conseiller représentatif de cette région du Gabon précisément le 15 décembre 1946. A la suite de son mandat de six ans, Jean-Stanislas Migolet se représente à nouveau pour être réélu conseiller mais cette fois-ci dans la région de l’Ogooué-Lolo. En 1952, le Conseil représentatif devient « l’Assemblée territoriale » du Gabon. Jean-Stanislas Migolet gagne de nouveau l’élection et redevient conseiller non plus représentatif mais territorial pour le compte du G7 du 30 mars 1952 au 31 mars 1957.

Respecté et admiré par plusieurs autres représentants du peuple, Jean-Stanislas Migolet est à chaque fois propulsé au poste de vice-président de l’Assemblée territoriale de 1954 à 1957. En mai 1957 notamment le 21, un Conseil du Gouvernement est mis sur pied et il s’agit là d’un gouvernement semi-autonome dans lequel Jean-Stanislas Migolet se verra confier le portefeuille du ministère des Affaires intérieures du 31 mai au 20 décembre 1957.

 Carrière politique durant l’autonomie et l’indépendance du Gabon

En 1958, un nouveau référendum constitutionnel est convoqué. Il doit donner naissance à une nouvelle constitution organisant la création de la « Communauté française ». C’est en effet une étape charnière qui précèdera l’attribution des indépendances aux actuels territoires français d’Outre-Mer. Mais pour l’heure, plusieurs d’entre eux deviennent autonomes à l’instar du Gabon. Jean-Stanislas Migolet remporte à nouveau les élections territoriales gabonaises du 31 mars 1957.

Ce sont les premières élections qui ont lieu au suffrage universel direct par application de la Loi-Cadre Deferre. Dans le même temps du 29 janvier 1958 au 9 novembre 1960, il est entre autres ministre du travail, de l’habitat, des affaires sociales et du tourisme. De février 1959 à février 1961, Jean-Stanislas Migolet est élu à L’Assemblée législative du Gabon en remplacement de l’Assemblée Territoriale. Ce sont les derniers réglages politiques et administratifs du pays pour mieux s’auto-gérer.

En mai 1959, notre protagoniste est ensuite choisi par ses collègues gabonais députés pour siéger au Sénat de la Communauté. Il occupera ce poste jusqu’en janvier 1961 et sera membre de la commission des affaires économiques au sein du groupe de l’Alliance pour l’Unité de la Communauté et Gauche démocratique.

Quand le Gabon accède à la souveraineté internationale le 17 août 1960, un nouveau gouvernement est mis en place quelques mois plus tard. Le 9 novembre 1960, Jean-Stanislas Migolet est nommé ministre de l’Intérieur et de la Sûreté nationale. Il le restera jusqu’au 21 février 1961. Avec la mise en place d’une Assemblée nationale pour marquer sa totale indépendance des décisions politiques de l’Hexagone, les premières élections législatives postindépendance sont organisées en terre gabonaise en février 1961.

Jean-Stanislas Migolet s’y présente pour le compte de l’Ogooué-Maritime. Il remporte l’échéance et devient vice-président de l’Assemblée nationale et président de la commission des finances et du budget. Le 12 avril 1964, de nouvelles élections législatives ont lieu et Jean-Stanislas Migolet se présente lors de ce scrutin sans pour autant être dans une formation politique. C’est donc en tant qu’indépendant qu’il est réélu député de la province de l’Ogooué-Lolo. Le 24 avril de la même année, Léon Mba lui fait de nouveau appel au sein du gouvernement et le nomme ministre de l’intérieur.

 Son étroite relation avec le président Bongo

Affectueusement appelé « Ngwa Moutou » par ses proches, ce pseudonyme a été par la suite adopté par toutes les personnes qui l’approchaient. Ennemi du l’oisiveté et de la paresse, Jean-Stanislas Migolet n’avait de cesse de clamer la rigueur dans la gestion de la chose publique au-delà de sa proximité avec les sulfureux régimes de Léon Mba et de Bernard Bongo. D’ailleurs après le décès du président Léon Mba en 1967, Albert Bernard Bongo prend les rênes du pays et le dirige d’une main de fer. Il met en place un Parti-Etat du nom de Parti démocratique gabonais (PDG), symbole d’une autocratie rude. Jean-Stanislas Migolet rejoint ledit parti et le président Bongo lui renouvèle sans cesse sa confiance.

Le 19 avril 1967, Albert Bongo fait de lui un puissant ministre d’Etat. Il occupera ensuite plusieurs ministères dont celui de la Santé publique, des Travaux publics ou encore du Travail. Il sera même promu au rang de vice-Premier ministre chargé des relations avec les Assemblées du 12 novembre 1975 jusqu’en 1983. Au sein du parti, Jean-Stanislas Migolet est une figure emblématique, il fait partie des personnalités qui forment le cercle très privé du président Bongo. Il fut tour à tour délégué général permanent du grand camarade puis secrétaire général du PDG. En 1983, Bernard Bongo le propulse au poste de Haut représentant du président de la République.

 Disparition

Jean-Stanislas Migolet tire sa révérence le 6 juillet de l’année 1987 au sein de la fondation Jean Ebori à Libreville. Il était âgé de 67 ans.

 Distinctions honorifiques et hommages

Comme distinctions honorifiques, Jean-Stanislas Migolet possédaient celles de Grand-Croix de l’Etoile Equatoriale, Grand-Croix de Léopold en 1961, Chevalier de l’Etoile d’Anjouan en 1950, Chevalier de la Légion d’honneur obtenue en 1957.
Dans la ville de Koulamoutou où il ouvrit les yeux pour la première fois, Jean-Stanislas Migolet est l’éponyme de plusieurs édifices et infrastructures notamment l’aéroport Jean-Stanislas Migolet ou encore le lycée d’Etat Jean-Stanislas Migolet.

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